Iseran : conditions dantesques pour une journée morose …

Tout allait si bien pour les coureurs tricolores, jusqu’à hier… Le 26 juillet 2019 restera une date gravée à jamais dans l’histoire du Tour de France. La 19ème étape, longue de 126 km, a été arrêtée au sommet du col de l’Iseran, à 37 km de Tignes, lieu où l’arrivée était prévue initialement. C’est une première dans l’histoire, certaines étapes avaient été annulée mais jamais aucune d’entre-elles n’avaient été arrêtées avant leur terme.

Un peloton décidé à entamer l’explication finale

Dès le début de la course, des costauds tentent de sortir du peloton. Deux leaders, Vincenzo Nibali et Dan Martin, sont suivis par deux bons grimpeurs, Jesus Herrada et Pello Bilbao. A l’avant du peloton, d’autres coureurs essayent de s’extirper mais le peloton ne laisse plus filer personne. A l’arrière de la course, grosse défaillance pour Thibaut Pinot. Le français, 5ème au classement général, n’avance plus et, avec l’aide d’un coéquipier, il met pied à terre, le visage larmoyant il abandonne le Tour de France pour la quatrième fois. Un énorme coup dur pour lui car il semblait être dans la forme de sa vie mais comme sur le Tour d’Italie, l’année passée, il est contraint à l’abandon à deux jours de la fin, seulement.

La détresse de Thibaut qui, victime d’une déchirure à la cuisse gauche, doit abandonner avec le réconfort de son équipier, William Bonnet

Le peloton perd des unités au fil des kilomètres, dès la côte de Saint-André, certains grimpeurs lâchent alors que cette première difficulté n’est classé quand 3ème catégorie. Démontrant ainsi le très gros tempo imprimé à l’avant du groupe maillot jaune par les équipes de favoris. Dans la deuxième ascension du jour, la montée d’Aussois, 25 coureurs rejoignent les quatre hommes de tête. Parmi eux, on retrouve quelques français dont Warren Barguil, le champion de France, et Tony Gallopin, coéquipier de Romain Bardet. Mais Romain Bardet n’est pas présent, en personne, pour défendre son maillot à pois. Il devra se méfier de Damiano Caruso qui avait pris 40 points au sommet de l’Izoard, la veille, et qui est de nouveau dans l’échappée avec un équipier de luxe : Vincenzo Nibali, le vainqueur du Tour 2014. L’italien de la formation Barhaïn-Mérida prend, comme attendu, les 5 points en sommet de la montée d’Aussois puis les 2 points en haut du col de la Madeleine. Il se rapproche ainsi à 19 unités du français.

Un col de l’Iseran péremptoire

L’échappée ne compte plus qu’une quinzaine d’éléments au moment d’aborder la terrible ascension du col de l’Iseran. Classé hors catégorie évidemment, ce col est long de 13 km et il abrite des pentes irrégulières pouvant atteindre les 15%. En passant au sommet de l’Iseran, les coureurs seront sur le toit du Tour 2019, avec une altitude de 2770 mètres. Dans le peloton, l’équipe INEOS mène un rythme d’enfer grâce à ses solides équipiers. Les deux leaders de la formation britannique, que sont Geraint Thomas et Egan Bernal, préparent quelque chose tandis que Julian Alaphilippe s’accroche, encore et toujours, aux roues de ses derniers équipiers qui lâchent les uns après les autres puis à celles des derniers cadors rescapés. Mais le coup de tonnerre éclate, Geraint Thomas attaque, le groupe est désorganisé et le maillot jaune est au bord de la rupture. La relance de Steven Kruijswijk lui sera finalement fatale, tout comme pour Romain Bardet. Mais le festival INEOS n’est pas terminé, à l’instar de la veille, le colombien Egan Bernal lance son offensive et dépose tous les favoris y compris Geraint Thomas. Il s’envole seul à la poursuite des quelques coureurs échappés, reprend un à un Vincenzo Nibali, Simon Yates et Warren Barguil, dernier français rescapé, puis dépose chacun de ces coureurs pour passer en tête au sommet de l’Iseran. Il ne le sait peut-être pas, mais à ce moment là, il prend le maillot jaune car derrière Julian Alaphilippe est bout de force. Il essaye de se remettre en danseuse mais ne peut reprendre du temps ni au groupe Geraint Thomas, ni à Egan Bernal, beaucoup trop fort. Tous ces coureurs basculent dans la descente vers les Brévières, au pied de la montée finale vers Tignes. Le maillot jaune reprend quelques secondes avant qu’un nouveau coup de théâtre surgisse. La course est arrêtée car la chaussée est impraticable, à cause de violents orages de grêle et de coulées de boues qui s’abattent dans la vallée, à partir de Val-d’Isère, à 20 km de l’arrivée. Les coureurs sont prévenus et ne comprennent pas cette décision car ils ne constatent aucunes intempéries dans le début de la descente, où ils se trouvent. La course est définitivement interrompu. Les écarts seront pris au sommet du col de l’Iseran. Egan Bernal est le nouveau maillot jaune avec 48″ d’avance sur Julian Alaphilippe avant une dernière étape de montagne qui s’annonce épique.

En passant en tête au sommet du col de l’Iseran, après sa nouvelle attaque, Egan Bernal prend le maillot jaune
Quatre images qui résument parfaitement cette journée inédite, en haut à gauche, Egan Bernal prend le maillot jaune après son attaque dans le col de l’Iseran, en haut à droite, le terrible abandon de Thibaut Pinot, victime d’une déchirure de la cuisse gauche, en bas à gauche, le déblayage de la chaussée après les orages de grêle et les coulées de boue qui ont frappé la vallée de Tignes, forçant l’arrêt de la course, et en bas à droite, l’immense déception de Julian Alaphilippe qui perd son maillot jaune à deux jours de la fin, après 14 jours passés avec la tunique dorée.

Valloire : Les colombiens en force !

Cette étape, longue de 208 km, arpentant successivement col de Vars, d’Izoard puis du Galibier, était peut-être le plus difficile de ce Tour de France 2019. Mais à l’issue de cette étape, tous les voyants sont au vert pour les français : Alaphilippe est toujours en jaune et n’a quasiment pas perdu de temps, Bardet reprend un maillot à pois inespéré après son début de Tour et Thibaut Pinot reste dans le top 5 a moins de deux minutes de Julian. A noter, la supériorité des colombiens sur cette étape de très haute montagne. Outre la superbe victoire de Nairo Quintana, Egan Bernal prend la deuxième place du général après une grosse attaque dans Galibier.

Beaucoup de mouvement en début de course

Le peloton roule fort dès le début de la course empêchant ainsi le formation d’un échappée. Dès que quatre hommes purent se détacher à l’avant, Peter Sagan fit rouler ses équipiers pour les rattraper et prendre un maximum de points au sprint intermédiaire. Plan qui échoue puisque ces quatre hommes passent au sprint intermédiaire des Thuiles à quelques longueurs des sprinteurs. Par la suite, 30 hommes rejoignent Adam Yates, Alexey Lutsenko, Lennard Kämna et Daryl Impey. Parmi ce groupe, on retrouve une nouvelle fois des leaders décrochés au général, qui vont tenter de gagner l’étape, comme Nairo Quintana et Romain Bardet, qui vient également jouer le maillot à pois. Maillot à pois que devra défendre Tim Wellens, présent à l’avant lui aussi. Le premier col de la journée se présente face au groupe de tête. Il s’agit du col de Vars, classé en 1ère catégorie, au sommet duquel Tim Wellens passe le premier. Romain Bardet est en embuscade. Dans le peloton, mis à part certains sprinteurs, pas de dégâts particuliers parmi les leaders.

Deux cols hors catégorie avant la descente vers Valloire

Après la mise en bouche du col de Vars, voici le plat de résistance : le col de l’Izoard, col hors catégorie avec une ascension de 14 km et des passages à 10%. Dans l’échappée, deux hommes tentent leur chance. On retrouve Greg Van Avermaet, souvent présent en échappée, et Julien Bernard, venu défendre le classement par équipes de sa formation Trek Segafredo. Le groupe de poursuivants ne s’affolent pas et gèrent l’écart. Côté peloton, l’écrémage commence après un coup d’accélérateur de la formation Movistar. Seul les meilleurs peuvent suivre le rythme et beaucoup de grimpeurs se retrouvent sans équipiers. Le maillot jaune tient bon tout comme ses principaux rivaux. A l’avant, le sommet se rapproche pour Julien Bernard, qui a lâché Van Avermaet, mais le bourguignon sent le souffle de groupe de chasse dans son dos. Groupe au sein duquel il ne reste plus qu’Adam Yates, Romain Bardet, Nairo Quintana et quels solides grimpeurs. Voyant que le maillot à pois, Tim Wellens, avait été lâché dans l’ascension, Romain Bardet lance le sprint pour les points au sommet, rattrapant Julien Bernard au passage, mais il passe deuxième derrière Damiano Caruso. Dans la descente, un groupe de 11 coureurs, les meilleurs grimpeurs, se reforment à l’avant, seul Romain Bardet a un équipier qui est en charge de neutraliser les différentes attaques. Dans le peloton, voyant qu’ils n’arrivaient pas à décrocher de leaders, les coureurs de la Movistar arrêtent de rouler. Ils ont tout de même repris quasiment quatre minutes dans le col d’Izoard à l’échappée parmi laquelle se trouve … Nairo Quintana, l’un de leurs leaders. Stratégie pour le moins spéciale. L’équipe INEOS impose désormais son tempo après qu’elle est vu de nombreux équipiers rentraient au sein du peloton lors de la descente. A l’avant, le groupe d’échappée se réduit de plus en plus et ne collabore plus du tout aux abords du col du Galibier, dernière difficulté de la journée mais classée hors catégorie, une nouvelle fois. Plusieurs grimpeurs accélèrent mais sont repris tour à tour jusqu’à l’attaque tranchante de Nairo Quintana. Le colombien a finement joué le coup, il s’est reposé dans la descente de l’Izoard, a suivi au train dans la vallée avant de placer cette attaque dévastatrice dans un moment de flottement à l’avant. Il s’envole vers le sommet et derrière on a du mal à réagir à cause de la désorganisation du groupe. Quand Bardet se décide à prendre les choses en main il est peut être déjà trop tard. Seul Lutsenko peut le suivre mais il ne prend aucun relais.

Le visage crispé, Romain Bardet tente de revenir sur Nairo Quintana après l’attaque du colombien dans le col du Galibier

Quintana bascule en tête au sommet du Galibier avec plus d’une minute d’avance sur Bardet, désormais seul à la poursuite du colombien, après avoir déposé Lutsenko pour s’offrir le maillot à pois (Il prend 30 points en haut du Galibier et possède 12 longeurs d’avance sur Tim Wellens). Le leader de la Movistar, sur son terrain de prédilection, a la victoire entre les mains, il ne lui reste plus qu’à assurer dans la descente vers Valloire. Retour dans le peloton où un autre colombien attaque sans pouvoir être suivi. C’est Egan Bernal, le maillot blanc, qui a profité du travail de son équipe (INEOS) pour se replacer à l’avant du peloton et déclencher son offensive. Aucun leader ne peut suivre le jeune grimpeur de 22 ans. Pire encore, il accentue son avance dans les pentes les plus raides. Moment choisit par Geraint Thomas, vainqueur sortant, d’attaquer. Les INEOS sont en démonstration dans cette deuxième partie d’ascension. Mais il est vite rejoint par Thibaut Pinot et les autres favoris, seul le maillot jaune manque à l’appel. Il est distancé est accuse un retard d’une vingtaine de secondes au sommet tandis qu’Egan Bernal devrait reprendre la deuxième place du général à son coéquipier Geraint Thomas.

Le coup de force du maillot blanc, Egan Bernal, qui distance les favoris dans l’ascension du col du Galibier

A l’avant, Nairo Quintana lève les bras et remporte la première étape alpestre du Tour 2019 à l’issue d’une descente bien maîtrisée et d’une attaque dans le Galibier qui montre qu’il est encore l’un des tout meilleurs de ce sport. Romain Bardet termine deuxième à 1’35 ». Derrière maintenant, Julian Alaphilippe n’a qu’un seul objectif : revenir dans la descente sur le groupe emmené par Geraint Thomas. Virtuose dans cet exercice, le maillot jaune trace des courbes parfaites dans le virages avant de relancer énergiquement dans les lignes droites. Il réintègre magnifiquement le groupe de devant et passe même à l’attaque pour tenter désormais de distancer les autres leaders. Il n’y parviendra pas mais qu’importe, il réalise encore une superbe étape et ne perd du temps que sur Bernal qui finit 8ème de la course et reprend 32″ à tous les favoris. Il pointe maintenant à 1’30 » de Julian Alaphilippe.

Auteur d’une descente exceptionnelle, Julian Alaphilippe a réussi à rattraper le groupe de leaders qui l’avait lâché dans le col du Galibier
Le classement général à l’issue de la 18ème étape

Gard : Un paysage magnifique et des coureurs plein de panache

Après une journée de repos plus que méritée, les coureurs abordaient deux étapes dites « de transition » avant de rallier les Alpes. Deux étapes sillonnant le Gard et ses paysages sublimes. La première de ces deux haltes débutait dans les arènes de Nîmes, avant d’être remportée au sprint par Caleb Ewan, tandis que la deuxième s’élançait du Pont du Gard avant d’être remportée par Matteo Trentin dans les Hautes-Alpes.

Dernière occasion pour les sprinteurs avant les Champs

Cette étape 100% nîmoise formait les derniers espoirs de victoire pour les sprinteurs encore présents dans le peloton. Partie des arènes de Nîmes, cette nouvelle journée présentait un scénario prévisible. A savoir une échappée avec les quelques courageux ayant encore des forces pour faire course en tête, avant qu’ils soient certainement repris, en fin de parcours, par les trains de sprinteurs au vu du profil de l’étape. Cinq hommes se portent à l’avant, Lars Bak, Lukasz Wisniowski, côté étranger et Paul Ourselin ou encore Alexis Gougeard ainsi que l’inusable Stéphane Rosetto. Dans le peloton, grosse frayeur, après avoir passé le Pont du Gard, Geraint Thomas loupe un virage et part seul à la faute. Une erreur de trajectoire sans trop de conséquences, si loin de l’arrivée, mais qui ne va pas mettre en confiance le vainqueur de l’an passé. Au sprint intermédiaire de Vallérargues, Elia Viviani passe tranquillement en tête, devant son poisson pilote. Dans l’échappée ce sprint n’a pas été disputé. Les équipes de sprinteurs roulent à l’avant du peloton et jouent au jeu du chat et de la souris avec l’échappée. Mais à 30 km de l’arrivée, une chute intervient, le grimpeur danois Jakob Fuglsang est à terre et ne pourra pas reprendre sa place dans le peloton. Il est contraint à l’abandon. Un gros coup dur pour le 9ème du général. A seulement 2 km de l’arrivée, les fuyards sont absorber par les équipiers de sprinteurs. Ces derniers emmènent leurs leaders jusque dans les derniers mètres où Elia Viviani, très bien épaulé, prend le dessus avant de se faire coiffer par Caleb Ewan sur la ligne. Deuxième victoire pour le petit sprinteur australien sur ce Tour de France. Il est le troisième coureur à réaliser le doublé cette année après Julian Alaphilippe, vainqueur à Épernay puis à Pau, et Simon Yates, premier à Bagnères-de-Bigorre puis sur le Prat d’Albis. Caleb Ewan avait lui gagner à Toulouse avant le sprint victorieux du jour.

L’australien Caleb Ewan peut célébrer sa deuxième victoire au sprint cette année après une étape qui a joué des tours à certains favoris

Une longue étape promise aux baroudeurs

Après une première étape gardoise remporter au sprint, celle-ci reliant le Pont du Gard à Gap, premier fief alpin cette année, ne fait aucun doute quand au fait qu’elle ne se terminera pas sur un sprint massif. En effet, au vue du profil accidentée de l’étape, avec notamment le col de la Sentinelle à moins de 10 km de l’arrivée, les baroudeurs auront une chance inouïe de remporter la course. Et les coureurs le savent, après une lutte acharnée, 33 d’entre-eux arrivent à se détacher. Certaines équipes tentent de revenir pour placer des hommes à l’avant mais en vain. Le mini peloton de 33 creuse même l’écart. Les favoris pour la victoire, au vue du profil proposé, sont tous là : Greg Van Avermaet, leader de la CCC, Thomas De Gent, vainqueur à Saint-Etienne, Matteo Trentin, champion d’Europe en titre, ou encore Edvald Boasson Hagen, sprinteur chez Dimention Data. Au sprint intermédiaire, à Vaison-la-Romaine, Andrea Pasqualon prend le dessus sur le reste de l’échappée. Dans le peloton, il ne peut être disputé au vu du nombre de coureurs présents dans l’échappée. Le peloton laisse carte blanche aux hommes de tête qui possède 10 minutes d’avance à 50 km de Gap. Certains rouleurs tentent de lâcher les grimpeurs, c’est le cas d’Alexis Gougeard, nominé combatif de l’étape de la veille, qui avec Ben King va former une première cassure. 9 autres coureurs les rejoignent avec notamment Van Avermaet, Matteo Trentin et Gorka Izaguirre. Certaines formations peuvent se mordre les doigts après ce coup d’accélérateur mis en tête de groupe. Lotto-Soudal ne place ni Thomas De Gent, grand favori pour la victoire à Gap, ni le jeune Jens Keukeleire et l’équipe UAE ne possède plus qu’un seul coureur à l’avant et ce n’est pas Rui Costa, dernier vainqueur à Gap, en 2013. Dans le peloton, l’équipe du maillot jaune mène un petit rythme de croisière que personne ne contredit. Retour à l’avant où Matteo Trentin attaque déjà, lui, qui avait été coéquipier modèle lors de la victoire de Yates à Bagnères-de-Bigorre, tente de faire le trou. Le champion d’Europe est en passe de réaliser un coup de poker exceptionnel car derrière seul Pierre-Luc Périchon essaye de revenir. Trentin passe en haut du col de la Sentinelle avec une trentaine de secondes d’avance sur ses poursuivants. Il ne lui reste plus que 8 km de descente à assurer avant de s’offrir un succès plein de panache. 30 secondes derrière Kasper Asgreen, danois et coéquipier du maillot jaune, a déposé Périchon dans la montée mais ne pourra aller chercher le champion d’Europe. Il devra se contenter d’une place d’honneur car Trentin lève déjà les bras sur la ligne à Gap. Quelle belle victoire pour l’italien qui signe le troisième succès de la formation Michelton Scott sur ce Tour. Un quart d’heure plus tard, le maillot jaune passe la ligne à son tour. Aucun changement notable au classement après ces deux étapes de transition.

Champion d’Europe en titre, Matteo Trentin s’impose en solitaire à Gap après une attaque tranchante dans le col de la Sentinelle

Pyrénées : Deux victoires pour Yates, Pinot impressionnant

A l’issue d’une dernière étape très rude, menant au Prat d’Albis, les baroudeurs ont bien su saisir leur chance avec un Simon Yates étincelant, qui rafle deux étapes sur trois dans les Pyrénées. Côté peloton, le tour de force de Thibaut Pinot est à saluer car il a repris plus d’une minute sur tous les favoris. Tandis que Julian Alaphilippe est toujours en jaune, reprenant même 23 secondes à Geraint Thomas, après le premier massif de ce Tour de France 2019.

Yates de nouveau vainqueur

L’étape vers le Prat d’Albis était la dernière avant la journée de repos et certainement la plus dure depuis le début du Tour. Par conséquent, les équipes de favoris ne voulaient pas perdre la moindre seconde, empêchant ainsi toutes tentatives d’échappée. Mais, comme souvent en montagne, un groupe étoffé arrive à se détacher. Une quarantaine d’hommes sont à l’avant, notamment de nombreux leaders décrochés au général tentant de sauver leur Tour. On retrouve notamment Nairo Quintana, pour la Movistar, Vincenzo Nibali, de sortie déjà la veille, et Romain Bardet. Ces deux derniers visant le maillot à pois après avoir vu leurs ambitions de maillot jaune éteintes dès le chrono de Pau. Dans ce groupe, Michael Matthews, sprinteur et leader chez Sunweb, prend les 20 points du sprint intermédiaire. Dans le Port de Lers, difficulté classée en 1ère catégorie, Simon Yates trouve les coureurs échappés trop nombreux et décide de dynamiter la course. Seule une dizaine de coureurs parvient à suivre le grimpeur anglais. Nairo Quitana, qui visait une potentielle victoire d’étape, est déjà distancé. Romain Bardet prend, quant à lui, le maximum de points au sommet, à savoir dix. Dans la descente, certains coureurs recollent, comme Quintana, par exemple, et l’échappée compte maintenant une vingtaine d’individus. Dans le terrible Mur de Péguère, qui suit le Port de Lers, Simon Geschke tente sa chance en solitaire, avec une attaque dès le pied du Mur. Dans le peloton, deux hommes attaquent, s’agissant de Mikel Landa et de Jakob Fuglsang, les favoris ne réagissent pas immédiatement mais contrôlent l’écart. De retour à l’avant, Simon Geschke, après avoir passé le sommet en tête, est rejoint par Simon Yates dans la descente. Les deux hommes attaquent la montée finale vers le Prat d’Albis avec une minute d’avance sur le premier groupe de poursuivants. Dans les pentes les plus raides de cette ascension, Simon Geschke paye ses efforts consentis dans le Mur de Péguère et voit l’autre Simon partir seul vers les hauteurs de Foix. Yates passe la ligne en tête et réalise un magnifique doublé pyrénéen.

Très belle victoire en solitaire pour Simon Yates, qui signe un doublé pyrénéen inespéré

Pinot roi du peloton

De nombreux coureurs sont intercalés entre le vainqueur, Simon Yates, et le groupe des favoris. Groupe dans lequel Thibaut Pinot attaque sous l’impulsion de son coéquipier de luxe, David Gaudu. Certains cadors ne peuvent pas suivre et ne tentent pas de le faire. Mais le maillot jaune, lui, y va. Julian Alaphilippe s’accroche à la roue du franc-comtois qui semble être dans une forme étincelante. Après quelques kilomètres supplémentaires, c’en est trop pour Alaphilippe qui craque, accusant les kilomètres acharnés de lutte pour garder son maillot. Thibaut Pinot reprend un à un les groupes intercalés à l’exception de Simon Yates. Le français termine deuxième avec dans sa roue Mikel Landa, auteur d’une course solide. Derrière, Geraint Thomas jette les dernières forces qu’il lui reste pour distancer légèrement le maillot jaune, qui perd exactement 27 secondes à l’arrivée. Le bilan reste tout de même très positif pour Alaphilippe qui a accentué son avance au classement général sur un terrain qui n’est pas son préféré. (En effet, Julian Alaphilippe ne possédait « qu’une minute douze » sur Geraint Thomas avant l’amorce des Pyrénées, tandis qu’il le distance d’une minute trente-cinq à l’issue de ceux-ci. Soit un gain de vingt-trois secondes.)

L’attaque de Thibaut Pinot dans le Prat d’Albis a fait beaucoup de mal a tous les favoris car personne n’a réussi à suivre le français, de bonne augure avant les Alpes

Une dernière semaine haute en couleurs

Après deux magnifiques semaines, le Tour de France va nous offrir, dans les Alpes, un dénouement à suspense entre les cadors de cette édition. Une journée de repos bien méritée pour des organismes épuisés mais une nouvelle semaine encore plus riche en émotions et en sensations.

Une image résumant tous les efforts de Julian Alaphilippe pour garder son maillot jaune

Les étapes alpestres

Tourmalet : Les français au dessus du lot !

Après la victoire de Julian Alaphilippe, sur le contre-la-montre de Pau, Thibaut Pinot signe lui aussi sa victoire, en haut du prestigieux col du Tourmalet. Alaphilippe termine deuxième et distance Geraint Thomas, son dauphin au classement général. Les français font preuve d’une solidité mentale et physique remarquables sur ce Tour 2019. Une journée parfaite, passée sous le regard aguerri du Président de la République.

Une étape condensée mais très éprouvante

L’étape du jour est courte (117 km) mais le col du Tourmalet va être très long et très dur pour les quelques costauds qui resteront à l’avant. Un autre col se dressera avant l’ascension finale, le col du Soulor. Dès le début de l’étape, l’échappée se forme et le peloton lâche du lest tout en gardant le contrôle de la course. Les fuyards ont des profils très variés, des grimpeurs distancés au général comme Ilnur Zakarin, des leaders en difficulté qui tentent leur chance avec Vincenzo Nibali, des puncheurs dont Lilian Calmejane et même le maillot vert courageux de Peter Sagan, venu joué le sprint intermédiaire. Dans la montée du Soulor, la tête de course se réduit et le maillot à pois, qui a rejoint l’échappée, prend les points pour le classement de la montagne. Dans le peloton, grosse surprise, Romain Bardet, qui vit un Tour calamiteux, lâche prise dès ce premier col, classé en 1ère catégorie. Au passage à Pierrefitte-Nestalas, lieu du sprint intermédiaire, Peter Sagan fait toujours parti de l’échappée. Le sprinteur slovaque prend 7 points avant de se relever.

Le supplice continu pour Romain Bardet. Le français, détaché dès le col du Soulor, perd plus de 20 minutes à l’arrivée

Un col du Tourmalet dévastateur

Le français Romain Sicard s’envole, seul, à l’assaut du Tourmalet. Le groupe des favoris reprend puis décroche, petit à petit, les derniers rescapés de l’échappée. Seuls deux français résistent encore au peloton avant l’ascension finale, Romain Sicard, parti à l’aventure, en solitaire, après le sprint intermédiaire, et Elie Gesbert qui est lancé à sa poursuite. Après quelques kilomètres, Elie Gesbert reprend Romain Sicard qui cale et laisse le breton, à son tour, seul en tête. Dans le peloton, l’équipe Movistar impose un gros rythme qui fait les frais de … Nairo Quitana, leader de cette formation. Les hollandais de la Jumbo-Visma prennent le relais et avalent Elie Gesbert. Il n’y a donc plus d’échappée avant que le champion de France, Warren Barguil, coéquipier de Gesbert, attaque et prenne un quinzaine de secondes sur le groupe maillot jeune à 7 km de l’arrivée. La tension est insoutenable dans ce groupe des favoris, les leaders craquent les uns après les autres et le groupe se réduit. Même le maillot jaune a du mal après l’accélération de David Gaudu, lieutenant de Thibaut Pinot, qui rattrape au passage Warren Barguil. Tout va se jouer dans ces cinq derniers kilomètres. A 2 km du sommet, coup de tonnerre, Geraint Thomas, deuxième au général, lâche prise. Julian Alaphilippe, quant à lui, s’accroche à la roue de Thibaut Pinot. Dans le dernier kilomètre, Thibaut Pinot attaque et dépose les cinq coureurs à ses côtés pour venir s’imposer au sommet de ce col mythique de la Grande Boucle. Julian Alaphilippe termine deuxième à la lutte avec Steven Kruijswijk. Quel exploit !

Victoire exceptionnelle de Thibaut Pinot au sommet du col du Tourmalet, col emblématique des Pyrénées.

Les enseignements au classement

Trente secondes après Julian Alaphilippe, Geraint Thomas franchit la ligne, la tête basse. Le gallois s’est su’il vient de perdre gros. Au général, il est désormais pointé à plus de deux minutes du maillot jaune, toujours en possession d’Alaphilippe après son nouvel exploit. Thibaut Pinot remonte à la cinquième place avec un peu plus d’une minute de retard sur Thomas. A noter qu’avec cette victoire au sommet du Tourmalet, col hors catégorie, le franc-comtois prend la deuxième place au classement du maillot à pois. Pour atténuer légèrement l’amertume de cette défaite, l’équipe INEOS (de Geraint Thomas) reprend le maillot blanc grâce à la présence d’Egan Bernal dans le top 5 de l’étape.

Le sourire de Julian Alaphilippe qui accentue encore et toujours son avance en tête du classement général

Pau : Un contre-la-montre d’anthologie !

Ce contre-la-montre, long de 27 km autour de Pau, marquait, hier, le centenaire du premier maillot jaune, décerné au français Eugène Christophe, le 19 juillet 1919. Pour lui rendre hommage de la meilleure des façons, c’est Julian Alaphilippe, maillot jaune de ce Tour 2019, qui a remporté ce chrono avec la tunique dorée sur les épaules.

Le premier maillot jaune de l’histoire du Tour de France, Eugène Christophe, sur son vélo, en 1919

Un exercice particulier mais décisif

Ce contre-la-montre individuel était la hantise de certains leaders non spécialistes de l’épreuve. Mais à l’inverse des années précédentes, cette exercice est placé en milieu de Tour, pour permettre aux cadors ayant pris du retard, de le combler dans les étapes de montagne ultérieures. Les pronostiques donnaient forcément les spécialistes favoris. L’ordre de départ est simple : la lanterne rouge, Yoann Offredo en l’occurence, part la première avant que les autres coureurs ne s’élancent, toutes les minutes, dans l’ordre croissant au classement. Pour les vingt derniers coureurs, les départs sont espacés de deux minutes. Avant le départ de Mikel Landa, premier membre du top 20, l’excellent belge Thomas De Gent, vainqueur à Saint-Etienne, signait le meilleur temps en 35’36 ». Déjà hors du coup depuis le début de ce Tour, Romain Bardet concède près de deux minutes à De Gent tandis que Nairo Quintana (leader Movistar) ou encore Dan Martin (leader UAE) prenne plus d’une minute.

Après un début de Tour compliqué et un chrono clairement pas à la hauteur de ses espérances, Romain Bardet abandonne tout objectif au classement général

Une victoire exceptionnelle mais inattendue

Après le départ d’Egan Bernal, il ne restait plus que deux coureurs sur la rampe de lancement. Les deux favoris les plus sérieux pour la victoire de ce Tour, Geraint Thomas, vainqueur l’année dernière et grandissime favori pour le gain du chrono, et Julian Alaphilippe, n°1 mondial, maillot jaune depuis une semaine et soutenu par tout un pays. Sur la route un homme fait bonne impression, il s’agit de Steven Kruijswijk, le leader hollandais de l’équipe Jumbo-Visma, 4ème au général. Mais à 17h17, heure de départ de Geraint Thomas, tout le monde n’a les yeux rivés plus que sur le mano à mano entre le maillot jaune est son dauphin. Le gallois, leader de la formation INEOS, fait une grosse impression visuelle. Impression qui se confirme au chrono puisque Geraint Thomas est dans les temps de Steven Kruijswijk mais moins de deux minutes plus tard le maillot jaune passe au premier point intermédiaire avec six secondes d’avance sur Thomas. Julian Alaphilippe, dont on prédisait une perte de temps, peut-être conséquente, est en train, une nouvelle fois, de déjouer tous les pronostiques en augmentant virtuellement son avance au général. Les bookmakers parlent d’une première partie d’étape plus favorable aux puncheurs avec ce profil vallonné expliquant, selon eux, la performance du berrichon. Tandis que dans la deuxième partie serait plus roulante et plus propice aux coureurs massifs comme Geraint Thomas. Mais Alaphilippe passe outre ces prédictions jamais indubitables et prend le meilleur sur son rival en conservant sa poignée de secondes d’avance, aux points intermédiaires de la côte d’Esquillot et de Jurançon. Geraint Thomas en a finit avec un temps en 35’14 » soit 22″ d’avance sur Thomas De Gent tandis que Julian Alaphilippe passe sous la flamme, il jette ses dernières forces dans le sprint pour réaliser un temps canon : 35′ ! Il colle 14″ à Geraint Thomas et remporte ce contre-la-montre, une deuxième victoire pour lui. Au général, il culmine désormais à 1’26 » de Geraint Thomas. Thibaut Pinot quand à lui réalise un bon chrono et reprend trois places au général pour revenir à en 7ème position à 3’22 » d’Alaph’. A noter que le maillot blanc change d’épaules, Enric Mas, coéquipier du maillot jaune, prend le leadership du classement des jeunes devant Egan Bernal, coéquipier de Geraint Thomas.

Julian Alaphilippe, maillot jaune, en position aérodynamique sur son vélo spécialement conçu pour l’épreuve du chrono qu’il a remporté à Pau, hier.

Occitanie : Début pyrénéen timide pour le peloton, profitant ainsi aux baroudeurs

Après une 11ème étape réglée au sprint par l’australien Caleb Ewan, dans les rues de Toulouse, le peloton abordait, hier, le début des Pyrénées, avec une étape longue de plus de 200 km. N’étant pas jugée au sommet d’un col, cette étape ne fut pas une journée de lutte entre favoris, dans le peloton. Les baroudeurs avaient encore leur chance et Simon Yates signe sa première victoire sur le Tour de France.

Une bataille rude pour former l’échappée

Le début d’étape est assez animé. Beaucoup de coureurs veulent former l’échappée quotidienne en attaquant dès l’entame mais le peloton ne laisse, pour l’instant, pas sortir d’éventuels baroudeurs. Après 40 km, un groupe fourni arrive enfin à se détacher à l’avant. Certains sprinteurs sont de la partie, comme Peter Sagan, le maillot vert, Michael Matthews, Sonny Colbrelli et Alexander Kristoff. Ils ne sont pas sortis pour aller chercher la victoire mais pour se disputer les points du sprint intermédiaire. A Bagnères-de-Luchon, lieu de ce sprint, Peter Sagan, bien emmené par ses coéquipiers, passe la ligne le premier. Par la suite, les sprinteurs se relèvent et laissent place aux grimpeurs pour débuter l’ascension du col de Peyresourde. Dès les premières pentes de ce col, l’échappée se disperse est deux hommes sont en tête. Le français, Lilian Calmejane, rejoint, donc, Sonny Colbrelli à l’avant de la course. Le sprinteur italien lâche très rapidement et Lilian Calmejane, leader de l’équipe Total-Direct Energie, continue son effort avec à ses trousses le groupe du maillot à pois, Tim Wellens. Ce groupe gère parfaitement l’écart et à 100 mètres du sommet Tim Wellens reprend Calmejane pour s’octroyer les 10 points du classement de la montagne, donnés en de col de 1ère catégorie.

Effort inutile pour Lilian Calmejane qui a passé l’intégralité du col de Peyresourde en tête avant de se faire reprendre au sommet

Simon Yates plus fort que tout le monde

Après avoir attaqué et fait le trou dans la descente du col du Peyresourde, l’australien Simon Clarke possède une minute d’avance sur le premier groupe de poursuivants. Il doit désormais franchir le col de la Hourquette d’Ancizan avec 10 km d’ascension. Certains coureurs intercalés ne peuvent plus suivre le rythme imprimé à l’avant, c’est le cas de Tim Wellens qui craque dès les premières pentes. Devant lui, la poursuite s’organise et le champion d’Europe, Matteo Trentin, passe à l’offensive pour tenter de revenir sur l’homme de tête. Grâce au travail de Matteo Trentin, Simon Clarke est repris avant le sommet et un autre Simon mais Yates, cette fois ci, accélère. Seul Gregor Mühlberger peut s’accrocher à sa roue. Les deux hommes passent le sommet en tête avec dans le rétro Pello Bilbao qui tente de revenir sur eux. Dans la descente vers Bagnères-de-Bigorre, l’espagnol de la formation Astana revient sur les deux fuyards. Ils sont maintenant trois pour aller chercher la victoire dans la vallée pyrénéenne. Sous la flamme rouge, les trois hommes se regardent avant que Yates attaque à l’entrée du dernier virage, il lance son sprint et ni Pello Bilbao, ni Gregor Mühlberger ne peuvent contredire sa suprématie. Première victoire sur le Tour de France pour l’anglais, vainqueur de la Vuelta l’année dernière. Le peloton, qui est resté très calme, aujourd’hui, passe la ligne avec près de 10 minutes de retard mais aucun danger pour le classement général, les coureurs échappés étaient bien trop loin. Julian Alaphilippe conserve, donc, son maillot jaune. Peter Sagan, quand à lui, semble au dessus, après sa nouvelle victoire au sprint intermédiaire, pour le classement du maillot vert. Et Tim Wellens avec les points pris en haut du col de Peyresourde conserve son maillot à pois.

Ayant fait forte impression dans la Hourquette d’Ancizan, Simon Yates s’impose au sprint dans la vallée, à Bagnères-de-Bigorre

Massif central : Alaphilippe assoit sa suprématie mais les espoirs de Pinot s’envolent

Jugées comme deux étapes de transition avant les Pyrénées, la 9ème étape et la 10ème étape n’auront pas été si calme qu’espéré par les prétendants au général. Certains, pris dans les cassures, perdent beaucoup de temps tandis que d’autres en profitent pour mettre la pression et établir un écart de référence.

9ème étape : Une échappée destinée à la victoire

Cette étape accidentée, partant de Saint-Etienne pour rejoindre Brioude, fief d’un certain Romain Bardet, et longue de 170 km, n’était ni destiné à une explication entre cadors, ni à sprint massif dans les rues de Brioude. De nouveau les baroudeurs courageux avaient leur carte à jouer. C’est donc tout naturellement que 14 hommes vont se détacher à l’avant. On retrouve notamment Tony Martin, pour Jumbo-Visma, Daryl Impey, le champion d’Afrique du Sud ainsi que deux français, Anthony Delaplace et Romain Sicard, en ce 14 juillet. Le peloton laisse filer et le groupe de tête qui prend plus de 5 minutes d’avance aux abords du redoutable mur d’Aurec-sur-Loire, au kilomètre 30. Ce redoutable mur n’est pas très long, 3 km, mais il est très pentu dans son intégralité, avec des passages à 20%. Seul un grimpeur pourra venir prendre les points mis en jeu au sommet de ce mur de 1ère catégorie. Tiesj Benoot, coéquipier du maillot à pois, assure les 10 points. La suite de l’étape est plus calme mais les hommes de tête ne cessent de prendre de l’avance sur le peloton. L’écart culmine dès à présent à plus de 10 minutes. Dire qu’un coureur de cette échappée ira au bout est désormais une certitude. Dans la descente de la côte des Guillaumanches, l’échappée éclate et seuls les hommes encore frais parviennent à accrocher le bon train. Trois hommes accélèrent mais sous l’impulsion de Jesus Herrada, l’espagnol de la Cofidis, une partie du groupe initial peut recoller. Un autre homme tente alors d’y aller seul, il s’agit de Lukas Pöstleberger, coéquipier de Peter Sagan. L’autrichien est repris par quelques un de ses compagnons matinaux dans la côte de Saint-Just, placée à 10 km de l’arrivée (3ème catégorie). Trois hommes attaquent, de nouveau, avant le sommet de la côte. Il leur reste seulement 10 km de descente à parcourir. L’irlandais de la Sunweb, Nicolas Roche, est lâché. Daryl Impey et Tiesj Benoot passent sous la flamme rouge et vont se livrer un sprint haletant pour la victoire d’étape. Le belge, loin d’être spécialiste du sprint, lance le premier avec dans sa roue le sud-africain, favori de ce duel, mais Tiesj Benoot se fait dépasser par Daryl Impey qui s’offre sa première étape sur un grand tour à 34 ans. Derrière, les poursuivants ne prendront que des places d’honneur à cause de la mauvaise organisation de ce groupe dans le final. Malgré une attaque de Romain Bardet dans la côte de Saint-Just, le groupe des favoris termine à un quart d’heure d’Impey. Au classement, rien ne bouge car les échappées étaient trop loin pour être dangereuses.

Le champion d’Afrique du Sud, Daryl Impey, remporte la victoire au sprint à Brioude face à Tiesj Benoot

10ème étape : un profil plat mais des favoris piégés

Malgré les petites côtes tout au long du parcours reliant Saint-Flour à Albi sur 217 km, cette dernière étape avant la journée de repos était promise aux sprinteurs solides, capables de tenir l’allure dans les bosses. L’échappée du jour est bien moins importante que la veille au vue du profil. Seuls cinq hommes partent à l’aventure, mais ce sont des habitués avec Nathnael Berhane et Mads Würtz. Michael Schär, déjà échappée sur ce Tour, lui aussi, rejoint le groupe de tête. Et toujours à l’inverse de la veille, les équipes de sprinteurs gèrent l’écart. Devant, le champion d’Érythrée, Nathnael Berhane passe en tête au sommet des quatre côtes de la journée, se replaçant, ainsi, au classement du grimpeur, 5ème avec 20 points. Après la côte de la Malric, la course s’anime et les équipes, visant la victoire d’étape, roulent. L’échappée perd du terrain et risque de se faire avaler rapidement. Le vent étant présent sur les petites routes du Tarn, les risques de bordures étaient bien réelles. Et le scénario prédit fut bien réel, avec une première cassure laissant 30 coureurs en chasse-patate derrière le peloton. Les rouleurs, à l’avant de la première bordure, se relèvent pour que l’échappée ne soit pas reprise immédiatement. Tout rentre dans l’ordre mais ce premier coup d’accélérateur n’est que l’amorce d’une véritable envie, chez les formations de leaders, de créer des écarts avant la montagne qui arrive dès jeudi. Les rouleurs se remettent, donc, à pied d’oeuvre et cette trois groupes se détachent. Celui du maillot jaune, en tête, celui des intercalés, et derrière celui des favoris distancés. Thibaut Pinot, Rigoberto Uran, Giulio Ciccone, Vincenzo Nibali ou encore Jakob Fuglsang risquent de perdre un temps précieux au général. Après avoir repris les échappées, le groupe de tête stabilise l’écart, avec les lâchés, autour d’une minute. Les trains de sprinteurs, accompagnés de ceux des leaders, roulent pour accroître leur avance et préparer le sprint. Tous les gros sprinteurs du peloton sont présents et ils vont se disputer la victoire à Albi. Sous l’impulsions des Sunweb de Michael Matthews, ils lancent leur offensive. Peter Sagan est enfermé tandis que Caleb Ewan et Michael Matthews, bien emmené, semble en bonne position. Mais c’est finalement Wout Van Aert, le triple champion du monde de cyclo-cross, qui déborde Ewan, Matthews et Viviani pour s’imposer en costaud. C’est déjà la quatrième victoire sur ce Tour 2019 pour l’équipe Jumbo-Visma. Trois sprints, avec trois coureurs différents, Teunissen à Bruxelles, Groenewegen à Châlon et Wout Van Aert à Albi, ainsi qu’un chrono par équipe, avec 20 secondes d’avance sur son dauphin. Une grosse performance pour cette équipe néerlandaise, armée en montagne également avec Steven Kruijswijk et George Benett.

Le jeune belge de Jumbo-Visma, Wout Van Aert, lève les bras après sa victoire au sprint, à Albi, devant tous les gros sprinteurs

1’40 » plus tard Tibaut Pinot passe enfin la ligne, la tête basse. Il n’est plus que 11ème d’un classement général toujours écrasé par Julian Alaphilippe, qui a désormais plus d’une minute d’avance sur tous ses poursuivants. Le franc-comtois voit ses ambitions au classement général réduites quasiment à néant …

Grâce à son effort à l’avant du peloton, Julian Alaphilippe augmente son avance en tête du classement général

Forez : Julian Alaphilippe de nouveau en jaune !

Après avoir perdu la tunique dorée lors de l’ascension de la Planche des Belles Filles, à seulement 6 secondes de l’italien Giulio Ciccone au général, le coureur de la Deceuninck Quick-Step avait une étape taillée sur mesure pour reprendre ce maillot et, en prime, creuser l’écart sur les favoris.

Une échappée victorieuse

Avec un départ précoce, dès les premiers kilomètres, tout le monde se disait que les quatre hommes de tête n’avaient quasiment aucune chance de rallier l’arrivée en tête. Le courageux belge, Thomas De Gent, l’audacieux, Niki Terpstra de l’équipe Total Direct-Energie et l’américain, Ben King, sont les fuyards du jour. Alessandro De Marchi, de l’équipe CCC, les rejoindra 20km plus tard. Dans le peloton, l’enchaînement des cols de la Croix Montmain, de la Croix de Thel et de la Croix Paquet font mal aux sprinteurs. Dylan Groenewegen, vainqueur la veille, Alexander Kristoff et Caleb Ewan sont contraints à faire l’élastique. Au classement du meilleur grimpeur, Thomas De Gent fait le plein de points pour protéger le maillot à pois de son leader, Tim Wellens. Le belge passe même en tête de toutes les difficultés répertoriées de la journée. Dans la côte de la Croix de Part, classée en 2ème catégorie, Niki Terpstra et Ben King sont lâchés. Thomas De Gent et Alessandro De Marchi vont continuer l’aventure en duo. Les descentes périlleuses de cette 8ème étape, longue de 200km, auront surpris certains coureurs. Dans l’échappée, Alessandro De Marchi manque de très peu la chute. A l’entrée d’un virage, il freine avant de chasser de la roue arrière et de passer à quelques mètres d’un mur. Tandis que dans le peloton, l’équipe INEOS de Geraint Thomas, vainqueur du Tour l’an passé, commet, elle, la faute. Deux équipiers du leader ainsi que Geraint Thomas, en personne, chutent et vont devoir batailler pour réintégrer leur place au sein du peloton.

La chute impressionnante de l’équipe INEOS lors de la 8ème étape

Le panache des français

Avec cette chute, le peloton est désorganisé, profitant ainsi aux hommes de tête qui creusent l’écart et peuvent désormais croire à la victoire. Derrière, Geraint Thomas, après avoir retrouvé l’arrière du peloton à l’aide de ses équipiers, doit maintenant remonter à l’avant pour préparer le final sinueux de cette étape. Alors que De Gent et De Marchi entame l’ultime difficulté de la journée, la côté de la Jaillère, le belge attaque et dépose son dernier compagnon d’échappée. Il est seul face à un groupe maillot jaune lancé à ses trousses. Dans ce groupe, il y a également du mouvement, profitant de l’absence de Geraint Thomas aux avants postes, Julian Alaphilippe accélère et Thibaut Pinot prend sa roue. Personne d’autre n’a réussi à suivre cette attaque à quelques mètres du sommet de la côte de la Jaillère. Les deux français basculent dans la descente et collabore parfaitement pour ne pas laisser les autres leaders rentrer. Devant, Thomas De Gent réalise un véritable numéro en soliste. Il ne craque et franchit la ligne le premier. C’est une immense victoire pour lui qui est habitué aux longues échappées.

Le belge Thomas De Gent célèbre cette victoire extraordinaire qu’il vient de remporter après une échappée de quasiment 200km.

Dans son sillage, nos deux français ont toujours de l’avance sur le groupe des favoris. Julian Alaphilippe laisse la deuxième place à Thibaut Pinot pour qu’il prenne les bonifications et qu’il accroisse son avance sur les autres grimpeurs du peloton. Un geste très professionnel qui va lui valoir le maillot jaune. Giulio Ciccone et les autres cadors terminent 20 secondes plus tard et l’italien cède son maillot au français.

Les deux français, Julian Alaphilippe et Thibaut Pinot, réalisent un très gros coup, après leur attaque dans le final de cette 8ème étape, en prenant respectivement la 1ère et la 3ème place du classement général

Planche des Belles Filles : les sprinteurs ont laissé place aux grimpeurs !

Cette première étape de montagne a été très mouvementée. Le maillot jaune a changé d’épaules et surtout les leaders se sont dévoilés et pour certains ont craqué. Cette mise en bouche, dans les Vosges, donne hâte d’arriver dans les Alpes et les Pyrénées. Au final, dans cette ultime ascension de 7km menant à la Planche des Belles Filles, avec une arrivée à 25% de pente, c’est Dylan Teuns, belge de la formation Bahraïn Mérida, qui s’impose.

Une entrée en Alsace vallonée

Avant la fameuse Planche des Belles Filles, le peloton deuvaient se heurter à l’étape raliant Saint-Dié à Colmar. Une étape promise, ni aux purs sprinteurs, trop escarpée pour certains, ni aux purs grimpeurs, pas assez ardue pour d’autres. Pour les baroudeurs et autres puncheurs, c’était donc l’occasion rêvée de se glisser dans l’échappée, capable d’aller au bout. Seul quatre hommes parviennent à s’extirper du peloton, mais aucun n’est dangereux pour le classemnt général. On retrouve Tim Wellens, habitué des raids en tête et porteur du maillot à pois, Simon Clarke, Mads Würtz, déjà présent devant lors de la première étape, et Toms Skujins. Wellens passe en tête de la première difficultée. Classée en 3ème catégorie, la côte de Grendelbuch lui rapporte 2 points. Le sprint intermédiaire est gagné par Simon Clarke, à l’avant, et dans le peloton, Elia Viviani, vainqueur la veille, coiffe Peter Sagan. La fin d’étape est plus difficile, Mads Würtz lâche prise et laisse ses trois compagnons d’échappée seuls à l’avant. Tim Wellens, toujours lui, passe en tête, sans trop d’effort, de la première côte de 2ème catégorie de ce Tour 2019. La côte du Haut-Koenigsbourg, avec 5 points à récupérer au sommet, permet au belge de la Lotto Soudal d’assurer son leadership au classement de la montagne. Dans le peloton, cette côte est la difficultée de trop pour une majorité de sprinteurs qui voient leur chance de victoire s’envoler. Seul Peter Sagan et Michael Matthews arrivent à suivre. A l’avant, Toms Skujins, le coureur de la Trek Segafredo, tente de larguer le restant de l’échappée. Il passe en tête de la côte des Trois-Epis avant d’être repris, comme les deux autres coureurs de l’échappée, dans la dernière bosse de la journée. La victoire va se jouer au sprint dans les rues de Colmar grâce au gros travail de chasse effectué par les équipes de sprinteurs. Le duel pour la victoire est clair, Peter Sagan, le maillot vert, devra battre Michael Matthews, l’australien leader de la Sunweb. Idéalement placé dans les 500 derniers mètres, Peter Sagan produit son effort et écrase toute concurence pour s’imposer en patron, ici, à Colmar, pour sa première victoire cette année. Côté maillots, rien ne change, les leaders les porteront une journée de plus.

Le maillot vert, Peter Sagan, peut exulter après cette magnifique victoire dans un sprint qu’il a survolé

Une Planche des Belles Filles redoutable

Après sa victoire à Epernay, lundi, Julian Alaphilippe n’avait qu’un seul objectif avant d’aborder la mythique Planche des Belles Filles : terminer l’étape en limitant la casse pour garder son maillot. Tunique à laquelle il commençait à s’habituer avec une troisième journée passée en jaune. Le début d’étape s’annonce difficile pour le peloton car il faut déjà gravir le col du Markstein, classé en 1ère catégorie avec plus de 10km d’ascension. Mais dès le départ une première échappée se forme, 14 coureurs sont à l’avant, on retrouve tous les prétandants au maillot à pois ainsi que son détenteur en personne, Tim Wellens. Le peloton laisse filer les hommes de tête et l’écart est conséquent au pied du Markstein, l’échappée se met déjà à rêver de victoire. Au sommet de ce premier col, Wellens passe en tête et fait le plein de points et de confinace avant d’aborder le Grand Ballon, quelques kilomètres plus tard. Le reste de l’échappée a du mal à suivre et deux hommes basculent seuls au sommet du Grand Ballon, le maillot à pois et un jeune italien, Giulio Ciccone. Après le col d’Hundsruck, classé en 2ème catégorie, l’échappée s’est reformée. Les 14 coureurs vont pouvoir attaquer le dernier col de 1ère catégorie avant la montée finale, le célèbre Ballon d’Alsace. L’écart avec le groupe maillot jaune, maintenant important, devrait permettre aux hommes encore frais à l’avant de faire la différence dans l’ascension de la Planche mais attention à la défaillance. Wellens passe de nouveau en tête, au sommet du Ballon d’Alsace, il reste un peu plus de 50km à parcourir pour la tête de course. Dans le col des Chevrères, Thomas De Gent, coéquipier de Wellens à la Lotto Soudal, attaque et tente de partir en solitaire pour les 10 derniers kilomètres avant l’ascension finale. Derrière le peloton roule fort sous l’impulsion des équipes de favoris, et devant l’échappée se morcelle, De Gent craque. Quatre hommes résistent et attaqueront la Planche des Belles Filles avec une avance suffisante sur le peloton pour se disputer la victoire d’étape. De nombreux coureurs coincent et seul deux hommes tiennent, Giulio Ciccone et Dylan Teuns. Ils se disputeront la victoire dans un duel au sommet. Le peloton avale les derniers réscapés de l’échappée matinale et le dénouement entre favoris approche. Après une ascension de 7km, Dylan Teuns dépose Giulio Ciccone dans les derniers mètres et s’offre une victoire exceptionnelle. Dans le groupe maillot jaune, deux français attaquent, Julian Alaphilippe, le porteur du maillot, et Thibault Pinot. Mais ils seront légèrement court face à Geraint Thomas. Le gallois finit quatrième et premier des favoris. Pour les leaders qui n’ont pas pu suivre, à l’image de Romain Bardet lâché dès le début de l’ascension, les écarts sont considérables.

Victoire exceptionelle pour Dylan Teuns, qui peut savourer après avoir passer remporter l’une des étapes les plus redoutables de ce Tour de France 2019

Au classement, la déception du Julian Alaphilippe contraste avec la joie de Giulio Ciccone. L’italien, deuxième de l’étape, prend le maillot jaune au jeu des bonifications, avec seulement 6 secondes d’avance sur le français. Le maillot à pois reste, quand à lui, sur les épaules de Tim Wellens qui cumule désormais 43 points.

Giulio Ciccone lève les bras. Grâce à sa deuxième place au sommet de la Planche des Belles Filles, il récupère le maillot jaune et le maillot blanc. Un consécration pour celui qui a terminé meilleur grimpeur du dernier Giro.